ARCHÉOLOGIE - Archéologie et informatique

ARCHÉOLOGIE - Archéologie et informatique
ARCHÉOLOGIE - Archéologie et informatique

Il y a longtemps qu’on ne s’étonne plus de voir associer le mot informatique, devenu comme un symbole de la technologie contemporaine, avec la discipline tournée par excellence vers le passé, l’archéologie: l’ordinateur est désormais adopté comme outil normal et nécessaire, présent dans tous les laboratoires où il est employé aux tâches les plus diverses, spécifiques ou non; il en va de même, d’ailleurs, pour une discipline voisine, l’histoire de l’art. Comme tous les chercheurs, l’archéologue se sert journellement d’un traitement de texte, aussi bien pour prendre des notes que pour préparer une publication, que désormais il remet souvent à l’éditeur enregistrée sur disquette, éventuellement sous une forme enrichie par les techniques de la P.A.O. (publication assistée par ordinateur); comme dans bien d’autres domaines, il refléchit à l’utilisation de l’enseignement assisté par ordinateur. Mais il est surtout remarquable que cet appel à l’informatique concerne, cette fois d’une manière spécifique, des besoins propres à l’archéologie, qu’il s’agisse de la gestion du patrimoine, de la constitution de systèmes documentaires, ou du calcul au sens le plus large du terme. Des ponts nombreux relient d’ailleurs, on le verra, ces trois grandes perspectives.

1. La gestion du patrimoine, du territoire au site

Notre société semble de plus en plus désireuse de sauvegarder son patrimoine historique: il lui faut donc le connaître, ce qui implique à la fois des actions de prospection, s’agissant de réalités souvent enfouies dans le sol, et des actions d’inventaire, qui permettront de protéger et de présenter. Ici déjà intervient l’informatique.

Pour la prospection par photographie aérienne, dont le satellite élargit la vision, l’informatique permet non seulement d’en traiter les images numérisées (renforcement des contrastes, etc.), mais aussi de les mettre en parallèle avec celles de sites connus, et ainsi déceler des sites inconnus. Les méthodes physico-chimiques de prospection au sol, d’ailleurs, et mêmes les plus simples carottages, tirent leur efficacité du traitement informatique qui, structurant leurs résultats chiffrés, permet de les interpréter. On a même proposé d’optimiser la localisation de sites en faisant appel à des techniques mathématiques d’échantillonnage, dont il est encore trop tôt pour en apprécier l’efficacité; on en dirait autant des tentatives utilisant des modèles d’organisation spatiale du peuplement.

Les sites archéologiques une fois repérés, il importe d’en faire l’inventaire dans la perspective de l’aménagement du territoire, avec cartographie de l’occupation des sols dans ses phases successives. Ici les systèmes d’information géographique (S.I.G.) combinent données cartographiques, données descriptives, images. Ainsi la France prépare vingt-trois banques de données, une par région archéologique, avec fichiers des sites, des opérations, des dépôts, etc., couronnées par une banque qui en fera la synthèse, véritable inventaire général permettant la programmation de la recherche à l’échelle nationale. De même, l’Angleterre, l’Écosse réalisent des National Records ; l’Italie, la Suisse lancent des entreprises du même type. Ainsi l’ordinateur apparaît comme un instrument privilégié pour l’aménagement des ressources culturelles d’un pays.

Ces systèmes s’appliquent aussi à la planimétrie urbaine, où ils facilitent la gestion des interventions d’utilité publique (égouts, etc.), tout comme à la gestion d’une fouille. Les archéologues ont d’abord continué à enregistrer sur papier les informations qu’ensuite ils reportaient dans l’ordinateur. Désormais l’étape papier peut être oubliée, avec les enregistrements directement saisis sur le chantier: dans le système ARKEOPLAN, par exemple, une caméra numérique, portée par un pied de 9 mètres de hauteur, donne une image sur un écran d’ordinateur; un logiciel en permet le traitement numérique, dont le produit peut être directement imprimé; il est aussi possible de tracer «en calque» sur ces images des plans et dessins interprétatifs et de les compléter par les informations verbales sur la stratigraphie ou les objets, qui passeront directement dans une banque de données ou un tableur. Ainsi l’archéologue, libéré de contraintes matérielles comme la prise des mesures, peut accorder une plus grande attention aux choix raisonnés qu’implique toute saisie de l’information sur le chantier.

Cette information peut alors être stockée dans des banques de données: il ne s’agit pas ici des banques générales dont nous nous occuperons plus loin, puisqu’elles concernent seulement un site (ou une région), et l’ensemble de sa documentation, de quelque type qu’elle soit. Certaines pourtant, parce qu’elles portent sur un domaine limité, peuvent prendre une valeur générale: ainsi l’entreprise qui archive les photographies de toutes les fresques, de tous les pavements de Pompéi, essentielles pour la connaissance de l’art décoratif en Campanie; ou encore l’informatisation que réalise le Comité pour la conservation des monuments de l’Acropole d’Athènes, qui, enregistrant des dizaines de milliers de documents, permet de guider les travaux en cours et, en plus, constitue une source désormais indispensable de renseignements sur certains des bâtiments les plus prestigieux de l’architecture grecque, dont la connaissance est renouvelée par ces travaux de protection.

2. Les systèmes généraux de documentation

L’archéologie est une discipline d’érudition, c’est-à-dire que toute avancée de la connaissance fait appel nécessairement aux trésors documentaires qu’elle a accumulés. L’informatique est vite apparue comme le moyen le plus commode de gérer cette information, que le développement de l’archéologie ne cesse d’enrichir dans une inflation difficile à maîtriser; d’autant qu’il s’agit à la fois de l’information primaire, portant sur les réalités archéologiques elles-mêmes (objets, configurations, etc.), et de l’information secondaire, portant sur les documents qui font connaître ces réalités, publications avec descriptions et commentaires, collections d’images.

Banques référentielles (secondaires) bibliographiques

Il faut distinguer, au-delà de la simple gestion des bibliothèques (commande, enregistrement, prêt des ouvrages), la bibliographie signalétique, qui signale les livres et revues contenus dans une ou plusieurs bibliothèques, et la bibliographie analytique, analysant le contenu des livres et aussi des articles dans les revues, recueils, etc., indépendamment de leur localisation. Des logiciels existent, plus ou moins adaptés à ces tâches; mais, si l’on veut éviter des redoublements inutiles de frais et d’efforts, les responsables ont de réelles difficultés à s’entendre sur leur choix, comme sur les formules d’enregistrement; surtout, l’analyse fine des livres et articles supposerait le travail de chercheurs spécialisés, guère disposés en général à accorder à la collectivité le temps qu’ils consacrent à leur propre fichier bibliographique, et qu’ils récupéreraient (avec intérêts) dans l’utilisation d’un outil collectif. Il n’empêche que des réalisations voient le jour, parfois prometteuses: ainsi la base de données FRANCIS permet d’accéder à la bibliographie de l’archéologie (mais non de l’archéologie classique) à travers l’écran d’un terminal ou du Minitel, ou à partir du CD-ROM, aussi bien que par fiches éditées; la Bristish Archaeological Bibliography recense les publications concernant la Grande-Bretagne et l’Irlande; la base DYABOLA informatise la bibliographie par matières de l’Institut archéologique allemand, etc. On peut espérer ainsi que l’archéologue aura à sa disposition des outils fiables, qui devraient rendre plus efficace sa recherche.

Banques référentielles d’images

L’archéologue peut souhaiter aussi retrouver d’autres documents secondaires, des images graphiques ou photographiques, éventuellement hors publication: il dispose pour cela de collections accessibles dans les centres de recherche ou les institutions. L’École française d’Athènes, par exemple, possède une photothèque de plus de trois cent cinquante mille documents en continuelle expansion; l’informatique est l’outil idéal pour gérer une telle masse, d’autant que le système effectivement mis en place prend aussi en compte le reste des archives, avec dessins, estampages, carnets de fouille, permettant de retrouver immédiatement, pour un document primaire comme une inscription, les documents secondaires de type divers qui en faciliteront l’étude. Mais un progrès décisif a été apporté par le vidéodisque, qui permet de mémoriser sur une face de disque environ cinquante mille images accessibles par appel d’un numéro, ou par consultation d’une banque de données plus ou moins sophistiquée. Ainsi le premier vidéodisque réalisé en archéologie classique enregistre les images d’une photothèque de mosaïque antique et les photographies de toutes les mosaïques grecques connues, des origines à la fin de l’époque hellénistique; la banque de données de la photothèque est relativement légère, celle sur la mosaïque grecque plus développée, car de type factuel. Le pilotage des images est encore différent pour le vidéodisque du musée du Louvre sur le Parthénon: car ici l’utilisateur visé n’est pas un spécialiste, mais un étudiant, un simple visiteur, auquel on propose des parcours variés à travers images et commentaires les situant dans la civilisation grecque; le vidéodisque sur l’art mobilier paléolithique au musée des Antiquités nationales de Saint-Germain-en-Laye est destiné, lui, aussi bien aux chercheurs qu’au grand public, et peut être consulté dans le musée ou à travers le réseau Transpac. Des progrès sont encore attendus, pour la qualité de l’image et ses possibilités de traitement, si on passe de l’analogique au numérique, c’est-à-dire du vidéodisque au CD-ROM ou au DON, et pour la commodité pratique qu’introduit le disque réinscriptible.

Banques factuelles

On a assez vite admis que l’information primaire sur les objets serait enregistrée dans les meilleures conditions par des banques de données générales, prenant en compte, comme les Corpus traditionnels, la totalité des documents connus dans un domaine déterminé, quel que soit leur lieu de conservation, avec les avantages complémentaires de l’informatique, possibilité de corriger ou d’enrichir et facilité d’accès. De là sont nés les projets de banques de données documentaires thématiques, dont certains ont abouti à des réalisations utiles et utilisées: ainsi, pour l’archéologie classique, l’informatisation de la Beazley Archive , enregistrant à Oxford l’ensemble de la céramique attique des VIe et Ve siècles avant J.-C., accessible à travers un réseau européen; ou, pour la mosaïque grecque, une banque dont la consultation se combine avec celle du vidéodisque évoqué plus haut.

Pourtant, ces projets n’ont pas eu le succès qu’on pouvait escompter, et en particulier n’ont pas donné de réalisation véritablement internationale, comparable par exemple au Corpus vasorum antiquorum . Les raisons en sont nombreuses, techniques (manque de compatibilité entre les matériels, les systèmes), mais aussi institutionnelles et psychologiques (essentiellement l’individualisme des chercheurs). Or, la logique de l’ordinateur implique qu’on donne de chaque document une transposition parfaitement contrôlée; les données doivent être construites, par un choix explicite des informations à enregistrer et de la manière de les enregistrer; et plus cette analyse est fine, complexe, plus long est son apprentissage pour ceux qui ont à la réaliser sur chaque document, pour ceux qui devront en connaître les règles à la recherche. Il est vrai aussi que les logiciels sont d’autant plus coûteux, lourds et difficiles qu’ils sont plus puissants. Or, le progrès de la micro-informatique a permis le développement d’entreprises à l’échelle du laboratoire ou du chercheur, utilisant éventuellement des logiciels du type «gestionnaire de fichiers» et rendant effectivement les mêmes services que le fichier individuel; malheureusement, ces réalisations non coordonnées, non compatibles, sans continuité institutionnelle, entraînent des redoublements d’efforts et de dépenses; alors que les banques devaient éviter le «feuilletage toujours recommencé» de la documentation, nous en arrivons à son enregistrement toujours recommencé.

On peut chercher des remèdes à cette situation, et d’abord en notant que les systèmes informatiques permettent désormais de combiner le travail individuel et les entreprises institutionnelles, à condition que des règles communes aient été posées: à l’École française d’Athènes, les fichiers des chercheurs, enregistrant divers types de matériels sur divers sites avec divers logiciels, alimentent les archives centrales, gérées elles-mêmes par un autre logiciel; une telle récupération permettrait de rentabiliser au moins en partie le foisonnement anarchique des entreprises, si un souci de coopération se manifestait dès leur début. Pour les grandes banques de données documentaires, dont on notera d’ailleurs que les logiciels tendent à devenir, eux aussi, de plus en plus conviviaux, la liaison entre analyses et images d’un vidéodisque peut prendre des formes particulièrement commodes pour l’utilisateur, avec passage du texte aux images, mais aussi des images, éventuellement choisies par feuilletage, à leur analyse, et constitution de blocs-notes enrichis par le chercheur selon ses besoins; c’est le cas pour la banque sur les mosaïques grecques déjà évoquée. On commence aussi maintenant à utiliser des logiques qui, prenant en compte l’incertitude et la probabilité, n’ont plus la raideur de la logique booléenne, et permettent en outre de traiter le langage naturel: ainsi une opération sur la sculpture hellénistique à Délos reprend une description de type traditionnel rédigée il y a des années; mais nous retrouvons ici la notion de «système d’information», sur lequel nous reviendrons après avoir évoqué un dernier type de banques.

Banques textuelles

Les banques textuelles rassemblent ces données primaires que sont les textes antiques, dont on sait l’importance pour l’archéologue – celui des périodes historiques évidemment. Pour les textes littéraires, les hellénistes disposent désormais de la version informatisée du Thesaurus linguae graecae , contenant tous les écrits depuis Homère jusqu’au VIe siècle de notre ère – environ 60 millions de mots enregistrés sur un CD-ROM; le texte étant codé, plusieurs interfaces de consultation ont été préparées pour l’accès à la base avec des fonctionnalités différentes. Mais il peut s’agir aussi de textes épigraphiques, que des systèmes informatisés permettent d’interroger selon les critères les plus variés, et aussi éventuellement d’éditer; une enquête récente a recensé, seulement pour l’épigraphie grecque et romaine, quarante et une entreprises, gaspillage dont on peut se demander s’il n’aurait pu être évité. Encore faut-il tenir compte des difficultés supplémentaires apportées par l’écriture, désormais à peu près surmontées pour le grec; les textes en cunéiforme sont transcrits pour le moment en caractères latins; pour les hiéroglyphes égyptiens (plus de 800 signes), on utilise leur transcription phonétique, ou un codage, ou une représentation graphique.

Systèmes d’information

On en arrive ainsi à la notion de système d’information, qu’on pourrait définir grossièrement comme la combinaison de divers types de banques de données accessibles à travers divers types de consultation interactive, avec l’utilisation de divers types de logiciels dont les hypermédias. Nous avons évoqué les systèmes d’information géographique; pour la documentation factuelle, on peut rattacher à ces systèmes la banque sur les sculptures de Délos déjà mentionnée, car à la base de données textuelle, interrogeable en langage naturel, s’ajoute une base factuelle; une banque sur les composantes du paysage dans des colonies de Sicile fait appel à l’hypertexte pour gérer à la fois données photographiques et textuelles. Mais l’entreprise actuelle la plus générale semble être le projet PERSEUS, qui s’efforce de couvrir l’ensemble de la Grèce antique en combinant textes, images vidéo et numérisées (de la vision par satellite au plan de bâtiment), accessibles sur un poste de travail multimédia d’où l’on peut appeler, par exemple pour le Parthénon, plans, images du décor, inscriptions, représentations anciennes, textes divers, bibliographies, etc. On imagine quels instruments de travail cette technologie rend possible.

3. Le calcul mathématique et logique

La notion de calcul a déjà été évoquée à propos de prospection et de modélisation du territoire. Le calcul intervient aussi dans la consultation des banques de données documentaires, mais sous une forme réduite, calcul logique de type booléen pour la réponse aux questions, calcul arithmétique pour des comptages. Il sera question ici de calculs complexes, qui, lorsqu’ils portent sur une banque de données, ne se limitent pas à y retrouver des connaissances déjà enregistrées, mais ajoutent du nouveau à la connaissance. Leur liaison avec l’informatique est évidente: avant l’ordinateur, il était dans la pratique difficile de dépasser une certaine statistique, dite maintenant descriptive élémentaire (mais elle permet de visualiser l’information et reste indispensable comme étape préalable); désormais, les algorithmes de la statistique multidimensionnelle résolvent en quelques secondes des problèmes d’une complexité extrême.

Ainsi se sont développées un grand nombre de techniques, dont la variété peut désorienter: ce n’est pas ici le lieu d’en expliquer les principes, et on se contentera d’indiquer leurs grandes catégories d’application. D’abord ce qu’on appelle souvent les techniques de structuration, parce qu’elles permettent de reconnaître et de caractériser des structures dans les données analysées – des classes, et il s’agit alors de classification automatique ou «taxinomie numérique», ou des séries, et on parle de sériation. Pour la classification, elles ont été appliquées dans leur diversité (classification ascendante hiérarchique, classifications non hiérarchiques, etc.) aux domaines les plus divers, de l’outillage paléolithique aux plaques-boucles mérovingiennes, et mettent en évidence l’existence de groupes avec leurs caractères propres; elles portent sur des nombres, par exemple le résultat d’analyses de monnaies ou de céramiques traduit par un dendrogramme, arbre renversé où les objets sont reliés par ordre de «distance» croissante; elles portent aussi sur des qualités, comme le décor des miroirs en bronze étrusques où le calcul révèle les fréquences et les fonctions des diverses divinités. La sériation, elle, reconnaît des évolutions chronologiques, par exemple de formes céramiques; encore faut-il savoir que les évolutions ne sont pas nécessairement unilinéaires, pouvant comporter sauts et retours en arrière. Application particulière, la «toposériation» se propose, par exemple pour des cimetières, de déterminer leur développement topographique dans le temps, sorte de «stratigraphie horizontale». D’autres outils, comme l’analyse discriminante, permettent de placer un document par rapport à des critères qui «discriminent» plusieurs groupes. De toute manière, il est nécessaire de tenir compte, dans l’utilisation de ces calculs, de la spécificité des données archéologiques par rapport à celles des sciences «dures», s’agissant ici d’observations non reproductibles, et souvent incomplètes. Et la valeur mathématique des méthodes apportant classifications ou sériations ne garantit pas leur qualité interprétative, qui doit être validée en fonction du contexte archéologique.

Un domaine ou le traitement automatisé donne des résultats particulièrement satisfaisants est l’infographie, informatique appliquée à la représentation graphique. Elle permet, on l’a vu, dans la gestion de territoires et de chantiers, de visualiser la distribution sélective des sites ou des objets; elle permet de rendre sensibles les résultats des calculs statistiques de classification ou de sériation; et aussi, avec la C.A.O. (conception assistée par ordinateur), de restituer en trois dimensions les restes architecturaux, de les «zoomer», de voir en superposition des états successifs, avec sortie des dessins correspondants.

C’est encore à une sorte de calcul, cette fois essentiellement logique, que s’assimilent les procédures de l’intelligence artificielle. Parmi elles, les systèmes experts semblent spécialement prometteurs: on a proposé par exemple de simuler le raisonnement de l’iconographe interprétant une image de signification assurée pour établir une base de règles, qui servira à interpréter personnages et situations dans des images de sens inconnu. La voie est sans doute séduisante, et il ne faudrait pas que l’archéologue se laisse rebuter par ce qu’un spécialiste a appelé «l’impression de stupidité que donnent ces systèmes d’intelligence»; il est vrai que ces outils devront atteindre, pour fonctionner comme l’esprit du spécialiste, une complexité considérable. Mais au moins ce travail nous oblige à raisonner sur notre raisonnement, à en expliciter les postulats implicites, à en fixer les enchaînements, à prendre en compte des incertitudes dont nous risquons, dans la pratique traditionnelle, de ne pas peser les conséquences. On en arrive ainsi à la notion de réécriture formalisée des constructions interprétatives, l’analyse «logiciste» qui reconstitue le passage des données initiales aux propositions terminales; et la conjonction de l’intelligence artificielle avec les banques de données pourra produire ce qu’on appelle déjà des «banques de données intelligentes». Finalement, toutes ces techniques de l’informatique, dont nous avons évoqué seulement les plus pratiquées, aident l’archéologue à mieux prendre conscience des besoins, des limites et des spécificités de sa discipline.

Encyclopédie Universelle. 2012.

Игры ⚽ Нужен реферат?

Regardez d'autres dictionnaires:

  • ARCHÉOLOGIE — L’ARCHÉOLOGIE est, aujourd’hui, une discipline foisonnante. De l’Europe à l’Océanie, de l’Afrique à l’Amérique, il n’est plus une terre qui n’attire les chercheurs. Il n’est plus de période qui ne les préoccupe, puisque l’époque contemporaine… …   Encyclopédie Universelle

  • INFORMATIQUE ET SCIENCES HUMAINES — S I L’IMPORTANCE des bouleversements que l’informatique provoque dans des domaines toujours plus nombreux de la vie sociale est désormais perçue, l’attention accordée aux modifications qu’elle introduit dans la connaissance de l’homme et de la… …   Encyclopédie Universelle

  • ARCHÉOLOGIE - La photogrammétrie architecturale — Les premiers traités de perspective, et notamment celui de Piero della Francesca (De prospectiva pingendi , vers 1490), envisagent déjà d’utiliser des vues perspectives pour en déduire les formes et les dimensions d’un objet, et l’amiral… …   Encyclopédie Universelle

  • ARCHÉOLOGIE - L’avenir de l’archéologie — Nul n’est en mesure, à la fin du XXe siècle, de dire ce que deviendra l’archéologie au XXIe siècle. Qui en a observé les développements à partir du milieu du XXe sait quelles mutations ont introduit, en ce qui concerne son domaine, une extension… …   Encyclopédie Universelle

  • INFORMATIQUE ET SCIENCES HUMAINES - Histoire et informatique — Les historiens utilisent l’informatique depuis quelques dizaines d’années. À partir des années 1970, après la parution de quelques livres pionniers (M. Couturier, T. K. Rabb), l’emploi de l’ordinateur pour le traitement de données historiques… …   Encyclopédie Universelle

  • Département Informatique, INSA de Lyon — Institut national des sciences appliquées de Lyon 45° 46′ 53″ N 4° 52′ 20″ E / 45.781260 …   Wikipédia en Français

  • Institut français d'archéologie orientale — L Institut français d archéologie orientale (ou IFAO) est un institut français de recherche en archéologie basé au Caire (Égypte), appartenant au réseau des écoles françaises à l étranger. C est la première institution scientifique française… …   Wikipédia en Français

  • Études d'archéologie en France — L archéologie est une discipline qui se situe au carrefour des sciences humaines et des sciences dites exactes. Elle exige une formation particulière même si différentes voies sont envisageables. Sommaire 1 Formation 2 Universités 3 Vie… …   Wikipédia en Français

  • Institut Français D'archéologie Orientale — L Institut français d archéologie orientale (ou IFAO) est un institut français de recherche en archéologie basé au Caire (Égypte), appartenant au réseau des écoles françaises à l étranger. C est la première institution scientifique française… …   Wikipédia en Français

  • Institut Français d'Archéologie Orientale — L Institut français d archéologie orientale (ou IFAO) est un institut français de recherche en archéologie basé au Caire (Égypte), appartenant au réseau des écoles françaises à l étranger. C est la première institution scientifique française… …   Wikipédia en Français

Share the article and excerpts

Direct link
Do a right-click on the link above
and select “Copy Link”